Le CDI que je découvre est composé de deux vastes salles contigües, avec attenant, le bureau du Conseiller d’Orientation, où nous classerons les documents de l’orientation professionnelle et scolaire. Il n’y a pas encore d’autodoc. A l’extérieur dans le couloir, cinq petites salles de travail de groupe, du luxe à cette époque. Au début, les enfants en usaient comme d’un sanctuaire, dans un silence religieux à peine troublé de chuchotements. Mais cette attitude -anormale- ne dura pas !!
Il y avait aussi, au dessous du CDI, une grande salle polyvalente. On y tenait le réfectoire pour la demi pension de midi, les cuisines jouxtant la salle. Mais on y avait installé aussi la salle de cinéma, avec un très grand écran au mur du fond. Il y avait un cagibi pour le projecteur de 16mm. J’y reviendrai surement.
Nous rentrons donc au CDI dans des locaux superbement vides. Le néant absolu. Il n’y a ni rangements, ni tables, ni chaises. Les murs sont couverts d’une moquette verte, rouge, bleue, et le sol d’une moquette ocre. Des couleurs fluos pétards... Dans ce grand espace vide, cela nous fait l’effet d’une giclée de citron sur les dents. L’architecte décorateur étant passé par là, les ploucs que nous sommes n’ont pas la parole, nous sommes censés admirer. Point. Le Principal nous a dit que les meubles vont arriver, mais on ne sait pas quand. Désespoir.
Planté au milieu de ce décor criard dont les couleurs semblent peu propices au calme et à la méditation, Francis a une idée : « Nous allons récupérer le mobilier du préfabriqué ! » Le bâtiment en préfabriqué n’a pas encore été vidé et il se trouve à cent mètres du collège. Le concierge nous prête sa brouette, et nous voilà en train de déménager, artisanalement, les chaises, les bureaux, les rayonnages encore vaillants. On travaille sans trêve, de 8 à 12 et 14 à 17. Ce labeur de déménageur commencé peu après la rentrée, va durer jusqu’aux vacances de Toussaint. Le Principal, fataliste, nous encourage en disant que les meubles neufs sont bloqués à l’UGAP pour d’obscures raisons.. Alors, n’est-ce-pas, il faut bien que le personnel s’occupe. On mobilise les élèves volontaires qui n’ont pas cours. Grace à leur aide, tout est aménagé au départ en vacances. On est content. Il n’y a toujours pas de livre, mais on a des meubles. Au moins les élèves pourront venir. Même s’il n’y a rien, on pourra toujours commencer à leur expliquer ce qu’est un CDI.
Quand nous revenons, huit jours après, ô divine surprise, les meubles neufs ont évidemment été livrés !! Livrés, c’est beaucoup dire ! On nous les a affalés au milieu de la moquette, en tas, dans leurs cartons d’enballage. Débrouillez vous, braves gens. Le personnel de service, complètement submergé de travail en arrivant dans ce bâtiment neuf certes, mais non aménagé, renâcle, en demandant un délai important. Alors, nous allons chercher nos caisses à outils et on se met à tout monter, visser et boulonner. Nous sommes contents c’est du Borgeaud, le top, le fin du fin. Mais qu’est ce que c’est lourd une fois monté, pour mettre ça en place. Une semaine, deux semaines de montage, et réaménagement du territoire. Les élèves déballent les cartons, évacuent les déchets. Nous on visse, on boulonne, on trimballe, on déplace, on redéplace... Le documentaliste basique a en lui un fonds de déménageur.
Enfin, tout est monté, fini, terminé, bien disposé... et vide. Toujours pas de livres. En désespoir de cause, nous décidons de faire un appel au peuple des parents d’élèves. Auriez vous des livres superflus et en bon état, à donner au collège ? Nous n’y croyons pas trop, mais, surprise, ça marche !! Je ne sais plus combien nous avons récolté de livres, mais je sais qu’il y en avait beaucoup. Dans le tas une Encyclopédie Tout L’Univers, parfaitement neuve !! C’est au moins un début. Le travail de cotation allait pouvoir commencer.
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