Le livre interactif : un outil pour la formation à l’information

(actualisé le )

Par Séverine QUÉRO, professeur documentaliste, académie de Rouen

Professeur documentaliste en collège et en lycée professionnel tertiaire, j’utilise le logiciel Didapages pour mettre au point des livres d’activités en collège depuis 2005. Dès la rentrée 2008, j’ai élargi l’utilisation du livre d’activités interactif au LP avec une classe de première année CAP esthétique dans un premier temps.
Cette année, j’ai prévu d’utiliser ce principe avec les nouveaux Bacs pro pour les matières S1, S3 et S4, en section Vente.
Ces livres interactifs fonctionnent à l’aide du petit serveur Didapages, proposé en téléchargement sur le site de l’association Les fruits du savoir.
Le tout est stocké sur le serveur web ; ainsi, l’élève peut se connecter à distance avec un login et un mot de passe. Il est possible d’établir un lien hypertexte pour accéder aux livres depuis les espaces Web de l’établissement : site Web, ENT...

Pourquoi avoir choisi de remplacer le classeur traditionnel par un livre interactif ?

Les objectifs qui ont conduit à l’utilisation du livre interactif sont :
- Disposer d’un meilleur suivi des activités en classe et sur le temps personnel afin de mieux déceler les difficultés de chaque élève
- Tenir compte du rythme d’apprentissage de chaque élève et d’effectuer une évaluation plus précise du travail personnel
- Favoriser le travail collaboratif entre enseignants

Ce choix est venu suite à un constat généralisé à toutes les sections du lycée professionnel : les élèves prennent une feuille blanche à chaque cours et finissent par la perdre. Il ne peut dans ce cas y avoir une démarche logique de formation dans la mesure où l’élève n’établit aucune relation d’un cours à l’autre.
Le livre interactif devait solutionner ce problème récurrent.

De plus, l’investissement personnel n’était pas non plus au rendez-vous mais la cause était difficile à comprendre : avait-il noté le travail à faire ? L’avait-il perdu ? Avait-il compris ?...En lycée professionnel, les élèves sont peu organisés, prévoir leur est difficile, conceptualiser pratiquement impossible
En se basant sur le rythme d’apprentissage de chacun et sur un outil innovant proche de leurs habitudes, le livre interactif peut nous aider à mieux appréhender les difficultés ou les réussites de chacun afin de les aider plus efficacement.
Au final, il s’agit d’un outil qui permet de concevoir, pour une classe, la formation à l’information sous forme de parcours. L’élève évolue à son rythme, et même si les temps communs doivent être réguliers, l’autonomie est favorisée.

Une pédagogie à adapter à l’enseignement professionnel
En lycée professionnel, une approche trop généraliste de la recherche d’information fonctionne mal : il est important de professionnaliser nos séances. L’élève a besoin que nous lui fassions découvrir des outils en relation avec son futur métier, comprendre leur utilisation afin de les réinvestir rapidement dans son métier. Il a besoin de concret et de sentir qu’il ne perd pas son temps.
En intervenant dans le cadre des matières professionnelles et des matières générales, j’ai constaté qu’un même élève peut se montrer plus réfractaire dans les matières dites d’enseignement général, il est en attente de justifications en posant la sempiternelle question : à quoi ça sert ? Alors que ce même élève, peut faire des efforts dans les matières professionnelles, participer, être plus épanoui tout simplement parce qu’il a l’impression que cela lui sera plus utile

Nous devons bien connaître leur domaine professionnel afin d’illustrer notre discours par des exemples qui leur sont familiers, d’établir des relations entre nos apports théoriques et des exemples pratiques qu’ils vivront ou qu’ils pourront vivre dans leur stage ou au cours de leur vie professionnelle.
Mais avant de convaincre nos élèves du bien fondé de nos cours, nous devons convaincre nos collègues, vaincre leurs réticences, leur prouver notre complémentarité.

L’avantage du livre interactif est de proposer une progression pédagogique visible. Dans le meilleur des cas, l’enseignant proposera des études de cas liées à la problématique que nous développons, cela permet à chacun de savoir quand intervenir (intervention plus pertinente, espace du savoir mieux partagé)
Afin de proposer un partenariat réussi, nous devons bien connaître les référentiels bien sûr (Les référentiels en LP tertiaire foisonnent de notions autour de l’information et du document ) et ne pas se soustraire au dépouillement des périodiques spécialisés qui est, à mon sens, une étape incontournable. Cela nous permet de s’imprégner du domaine, connaître le vocabulaire technique, les innovations, cela peut aussi de nous donner des idées pour de nouvelles séances.
Ainsi, nous avons des pistes pour proposer des réponses concrètes à des besoins professionnels et pour démontrer qu’améliorer les compétences professionnelles des élèves passe par une bonne connaissance des outils, une bonne évaluation et gestion des informations.

Il ne faut pas se leurrer, le travail de mise en œuvre du livre interactif incombe essentiellement au professeur documentaliste pour le moment, il faut espérer qu’en généralisant cet outil l’enseignant de discipline aura peu à peu une vision plus élargie de notre pédagogie et pourra à son tour faire des suggestions qui ne nous limiteront pas à un apport méthodologique, participer plus activement à l’élaboration du livre.

Voici donc les deux exemples de livres interactifs, le premier -CAP esthétique- a été testé et a subi quelques réajustements, le deuxième - Bac pro Vente- est en cours de test cette rentrée et subira des ajouts et des modifications très probablement !

Bilan de l’expérimentation du 1er livre :

Du côté des enseignants
La complémentarité pédagogique fonctionne bien : chacun trouve plus facilement ses marques ; le syndrome de « l’enseignant qui fait tapisserie » est très atténué : chacun sait à quel moment intervenir. À ce niveau, cette expérience est très enrichissante et motivante.

Du côté des élèves
Le livre interactif n’a pas encore solutionné le problème du travail personnel : il est apparu clairement que les problèmes de travail personnel que nous pouvions rencontrer par le passé avec des excuses de type : « j’ai oublié mon travail à la maison » ont été remplacées par : « je n’ai pas pu me connecter : mon ordinateur était en panne », « j’ai essayé de me connecter mais ça ne marchait pas » « j’ai fait le travail demandé mais les résultats ne se sont pas enregistrés »...sont devenues courantes. Des remarques étonnantes ont émergé : les élèves ont exprimé leur lassitude à ne « faire que de l’ordinateur » !

Néanmoins, il ne faut pas se décourager car les effets positifs ne sont pas à négliger !
Impossible de ne pas voir les élèves qui travaillent et ceux qui ne font pas grand chose. Tout est consigné : temps passé, enregistrement du travail...Les diagnostics et les évaluations sont plus précis et conformes à la réalité. Toutes les activités sont évaluées, ce qui permet à chaque élève de mieux se positionner par rapport à sa formation.

Toutes les élèves ont pu conserver une trace écrite des leçons, elles ont toutes eu la même chance d’apprendre les mêmes notions, ce qui n’est pas toujours le cas dans les cours plus traditionnels où l’apprentissage des leçons dépend presque uniquement des notes prises en cours : généralement, si un élève a été absente ou n’a pas noté correctement son cours, il part avec un handicap et le résultat s’en ressentira. Le livre interactif permet à chacun d’accéder au même contenu, d’apprendre sur un même pied d’égalité, de remettre sur les rails les élèves qui décrochent.

Au final, j’ai constaté tout de même, une meilleure adhésion des élèves à la fin de ce parcours « initiatique » et surtout un réinvestissement de ce cours dans des travaux de recherches donnés par d’autres enseignants.


Voir le livre pour les CAP esthétique
Voir le livre pour les Bac pro vente

P.-S.

Les captures d’images n’apparaissent pas très nettement en mode consultation, il est alors possible d’opérer un clic droit sur les images et de sélectionner « zoom avant » pour les agrandir. Ce défaut est estompé en mode « apprenant », lorsque le livre est déposé sur le serveur pour les élèves.

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