Julie Poirier travaille au sein de Science Animation, une association toulousaine chargée de partager la culture scientifique et technique et la culture de l’innovation. Cette association réalise des expositions, conçoit des ateliers à destination des scolaires, coordonne des évènements, organise des conférences, développe des outils numériques...
Julie Poirier y est chargée de conception et médiation, elle consacre une partie de ses actions à la conception d’expositions à destination du grand public.
Il nous a semblé intéressant de nous arrêter avec elle autour de deux notions de plus en plus présentes dans les discours : médiation, créativité. Merci à elle pour ses réponses.
Bonjour Julie, il est actuellement possible de voir à Toulouse une exposition au Quai des savoirs intitulée “Inventez la ville….dont vous êtes le héros”. Au-delà de la thématique qui peut nous intéresser en tant que professeur(e) documentaliste (avec des séances par exemple dans le cadre de la géographie en 6e, mais aussi technologie), la manière dont a été conçue cette exposition est originale puisque vous avez fait appel à des techniques de créativité. Pouvez-vous nous raconter ? Est-ce que ce sont des techniques transférables pour nos séances et dans nos CDI selon vous ?
Nous utilisons les techniques de créativité à plusieurs échelles lorsque nous travaillons un projet d’exposition comme celui-là.
D’une part, nous les exploitons comme outil de travail dans la méthodologie de projet. Par exemple, au tout début de la réflexion sur ce projet d’exposition, nous avons organisé une journée créative avec des professionnels aux profils très différents : graphistes, développeurs, scénographes, communicants, agents d’accueil, médiateurs, techniciens...
Et avec l’utilisation de plusieurs méthodes de créativité, nous avons laissé vagabonder notre imagination afin de proposer un maximum d’idées autour de l’exposition.
D’autre part, grâce à notre camion itinérant, le propulseur, que je vous invite à aller découvrir également, nous avons eu l’occasion d’aller rencontrer une diversité de personnes et de leur demander d’imaginer leur ville de demain, et ce, toujours à l’aide d’outils créatifs. Ces éléments ont ensuite servi à la conception de l’exposition.
Ces diverses méthodes, nous les utilisons régulièrement auprès d’un public scolaire. Et cela fonctionne très bien ! D’ailleurs, il nous est déjà arrivé de former des professeurs à ces méthodes afin qu’ils puissent se les approprier et les réutiliser au sein de leurs enseignements. Alors oui, bien entendu, tout cela est transférable.
Plus que l’accès aux ressources et aux informations de l’exposition, ce qui frappe c’est tout le travail de médiation qui a été fait. Quels sont les éléments clés d’une médiation réussie selon vous ?
Voilà une question intéressante mais pas évidente. La médiation est un terme tellement vaste qu’il est complexe d’apporter une réponse précise. En effet, une médiation orale sera très différente d’une médiation par le biais d’un outil interactif ou d’une médiation par une vidéo... Cependant, il me semble que les éléments clés peuvent être les suivants : interactivité, contenu, dimension ludique, originalité.
Que pensez-vous de l’idée de former nos élèves à eux-mêmes concevoir des dispositifs de médiation ?
Je pense que c’est une superbe idée ! Accompagné par des professionnels, je suis persuadée que cette démarche pourrait s’avérer vraiment pédagogique !
Julie, vous travaillez au sein d’une équipe pluri-disciplinaire. Qu’apportent ces regards croisés sur les sciences ?
Déjà un recul permanent sur les actions que nous menons et les sujets que nous questionnons. De plus, cela permet de traiter des sujets en croisant les approches, les points de vues, les attentes... En effet, les profils sont très variés. Au sein de l’équipe, il y a des communicants, des profils artistiques (scénographie, graphisme...), des profils techniques (électronique, informatique, menuiserie...), des médiateurs scientifiques, etc.
Pour mener les projets, il nous arrive de nous retrouver tous autour de la table, pour brainstormer et phosphorer ensemble.
L’enrichissement personnel et professionnel, de part nos différentes compétences, est quotidien et apporte, je l’espère, de l’originalité dans nos propositions de contenus.
Vous dites que l’objectif pour vous est de créer du lien. Est-ce parce que vous trouvez qu’il en manque dans notre société ?
Fondamentalement, oui je pense. Nous sommes tous différents, avec des envies, des points de vues et des attentes diverses. Simplement, il me semble que nous ne prenons pas assez le temps de confronter nos avis, de les mettre en débat, d’apprendre des autres pour avancer. Et le milieu de la recherche, entre autres, questionnent de nombreux sujets au quotidien, et il me semble vraiment important de s’en enrichir.
En particulier, vous faites du lien avec de nouveaux lieux tels que les fab labs en soutenant leur développement. En quoi cela vous semble-t-il important ? Pensez-vous que ce dispositif ait sa place dans les écoles et pourquoi pas dans (ou en lien avec) les CDI ?
Ces « nouveaux » lieux sont extrêmement importants et auraient tout à fait leur place dans les écoles. Les fablabs, lorsqu’ils s’inscrivent dans une démarche pédagogique, permettent de se réapproprier le geste technique, de mieux appréhender la technologie, de comprendre un processus technique dans son ensemble...
C’est absolument passionnant !
Comment définiriez-vous la créativité ? Pourquoi est-il selon vous utile de la développer ?
La créativité fait partie de nous. Ce n’est pas un don, réservé seulement à certaines personnes. Elle est partout. Nous pouvons être créatifs dans le domaine artistique, mais aussi en cuisine, en informatique, en science... La créativité ne s’oppose à rien et surtout pas à une démarche rationnelle. Ces deux approches sont, au contraire, extrêmement complémentaires.
Nous en sommes dotés dès le plus jeune âge, mais nous avons trop souvent tendance à la laisser s’éteindre. Il s’agit donc pas tant de la développer mais davantage de la remobiliser.
Alors pourquoi ? Parce que plus on va la mobiliser, plus ce sera simple ensuite d’être créatif ! Et franchement, ça fait du bien
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