Interlude

Interlude I Le virage informatique

(actualisé le )

À la fin des années 70 et au début des années 80, il advint un nouvel outil dans l’enseignement qui allait révolutionner, là comme dans beaucoup d’autres domaines, l’ensemble du système.. J’en avais subi personnellement les premiers effets au titre de joueur d’échec, avant même les PC. A cette époque j’étais un acharné du jeu d’échec, et, par manque de temps, j’avais dû me retirer du Club où je pratiquais. J’avais appris à jouer lorsque j’étais au Lycée de Nîmes avec les élèves de la section Tchèque du Lycée, qui venaient en France (en Seconde, Première et Terminale) passer leur Bac, et dont c’était le sport favori !! Je leur apprenais l’histoire et la géographie et, juste retour des choses, eux m’apprenaient les échecs !!

Or donc, j’avais fait venir des USA, en quittant mon Club, un ordinateur d’échec, car on n’en trouvait pas de valables en France en ce temps là. Je ne vous dis pas les nombreuses raclées que j’ai subi de la part de cet outil... et les nuits que j’y ai passé..! Mais Dieu que c’est beau les échecs, et j’apprécie autant une belle partie d’échec qu’une symphonie, c’est tout dire.

Mais, revenons à l’enseignement.

Les ordinateurs furent introduits dans le système scolaire sous la forme du Plan IPT ( Informatique Pour Tous), au début des années 80.

Dans les Etablissements, cela nous arriva sous la forme tangible du fameux Nanoréseau !! Pour ceux qui ne saurait pas ce que c’est, disons qu’il s’agissait de huit petits ordinateurs Thomson, interconnectés, avec un serveur PC sous DOS. Cet appareil n’avait pas d’écran couleur mais monochrome ambré, ou noir, selon les modèles. Je précise que ce PC était à l’époque dépourvu de disque dur. Il y avait simplement un double lecteur de disquettes de 5 pouces, A et B. Sur le lecteur A se trouvait le système DOS !! Sur le B, on mettait des applications.. Chaque disquette avait, je crois, l’impressionnante capacité de 250 Ko !! Quant aux mini ordinateurs Thomson, leur mémoire était infime.. Que ce soient les TO7 ou leur successeurs les MO5 ou MO6, ils ne possédaient que quelques Kilos de RAM, pas plus... Pour les moniteurs, on utilisait de petits téléviseurs.

Je sais que le nanoréseau a fait beaucoup gloser. On l’a beaucoup critiqué. Mais on l’a aussi beaucoup encensé. Il a fait couler beaucoup d’encre. On a dit qu’il avait servi d’exutoire pour les pièces détachées dont Thomson n’avait plus l’utilité, on a dit que le Nanoréseau n’avait servi qu’à Thomson. C’est possible, encore que.. mais je m’en moque. Pour moi, le Nanoréseau a eu un mérite essentiel et irremplaçable : c’est celui d’avoir fait accéder l’Education Nationale, c’est-à-dire les élèves, à l’ère informatique.

Je ne me demande même pas où en serait l’EN à ce sujet s’il n’y avait pas eu le Nanoréseau, tant je suis convaincu que justement elle ne serait nulle part !! C’est à peu près comme si, dans le siècle écoulé, on avait enseigné sans livre !! Preposterous ! comme disent les anglais. Idiot, absurde !

Par contre, cela n’a jamais signifié que l’ordinateur allait supplanter tous les autres outils d’enseignement. C’est un outil de plus, mais aussi indispensable que les autres, qui demande, comme les autres, de savoir aussi maîtriser tout le reste. La culture est de type cumulatif : elle ne doit rien ignorer, justement, et jamais ne rien oublier en chemin. Au surplus, l’ordinateur est un outil nouveau dont, même encore, on ignore une grosse part des possibilités en matière éducative, ne serait-ce qu’à cause de la rapidité de son évolution. J’y reviendrai.

Au collège de La Grand’Combe, il me semble que le Nanoréseau arriva en 1983. On l’avait installé dans une très grande salle au 2° étage du collège, qui possédait en outre une salle annexe, plus petite mais contigüe, et suffisante pour accueillir une classe, ce qui fut très utile par la suite..

Les professeurs de Technologie avaient pris les choses en main, car ils avaient reçu officiellement une formation au Nanoréseau. J’étais monté voir ça plusieurs fois, en voisin, par curiosité, car le CDI gîtait juste au dessous.. mais sans plus. Je n’avais pas encore pris le virus.

Ce fut l’attitude des pourtant rares tenants du Nanoréseau et de l’Informatique qui changea tout. Un beau jour je fus fatigué de les entendre clamer à tous les échos que c’était la panacée universelle des maux de l’Enseignement, et surtout, fatigué de les voir contempler de haut les malheureux ignorants comme moi.

Ayant fait ce constat, qu’il ne m’était plus possible d’ignorer complètement la chose, et de toutes façons, cédant ainsi à mon plus grand défaut qui est une invincible curiosité pour à peu près tout, je me rendis chez un marchand et me procurais personnellement un MO5 de Thomson. Cet engin venait de remplacer sur le marché les premiers TO7. Mais cela, à vrai dire, ne constituait pas mon coup d’essai.

En effet, l’année précédent l’arrivée du Nanoréseau, une collègue avait créé un Club Informatique !! Elle avait fait acheter un ordinateur (!), je dis bien un seul, qui était un ZX de Sinclair. Toujours motivé par mon habituelle curiosité, ce fut le premier ordinateur auquel je touchais vraiment !!

Il était gros comme deux boites d’allumettes. Dépourvu de moniteur, on le branchait sur une petite télé noir et blanc, à l’aide d’un boitier plus gros que lui et de tout un tas de câblages fort complexes. Cet engin nous ravissait et pourtant. Pour lui faire simplement tracer un cercle à l’écran, il fallait écrire dix lignes de code dans une espèce de Basic primitif. Et, puis, le programme une fois lancé, il fallait un bon quart d’heure à l’ordinateur pour finir de tracer le cercle prévu.. On avait le temps de prendre un café, ou comme disait ma grand mère « d’assommer un âne à coup de bonnet » !!

A côté de cet instrument, le MO5 me parut, tout est relatif, une Mercédés de compétition..

C’est ainsi que je fus pris par le virus informatique qui allait complètement changer le reste de ma carrière

Partager cette page